Jeudi 12 juillet 1990

Cordes. Jérôme doit m’y rejoindre demain midi, à l’hôtel de la Bride où je suis descendu (monté plutôt), sur la place qui domine tous les environs.

Hier, je suis arrivé à Figeac en début d’après-midi et je me suis installé à l’hôtel de Pont d’Or, tout au bord du Lot, à côté du pont du même nom. Les patrons, des parisiens, venaient de le reprendre, nous avons sympathisé, avec la patronne surtout. Au cours d’une longue conversation, elle m’a dit avoir habité au 46 boulevard Voltaire dans sa jeunesse. Nous nous sommes mutuellement offert l’apéritif. Là-dessus est arrivé un représentant en décoration intérieure et florale arpentant toute la France et l’Europe, nous avons dîné ensemble, continuant à bavarder. J’avais eu le temps auparavant de visiter en partie la vieille ville de Figeac, exceptionnelle, attendant le lendemain pour mieux en apprécier tous les aspects.

Figeac m’est apparue comme la ville de France qui a gardé intacts le plus de témoignages directs de son passé médiéval : ses rues, ses maisons, ses cours intérieures, ses échoppes, ses toits et ses ruelles sont autant vestiges authentiques. Quel plaisir de les dénicher au hasard de mes pérégrinations. Bien des rues sont piétonnes, échelonnées de boutiques fréquentées par les touristes mais dès qu’on s’en écarte un peu, alors on se retrouve au cœur d’une architecture extraordinaire de voûtes superbes, d’étages en surplomb, de cours pavées, de grands porches à sculptures étranges, de toits en décrochements successifs, d’escaliers de bois, de balcons à balustres. De nombreuses demeures ont été restaurées ou sont en voie de l’être, comme cet Hôtel de la Confrérie des Templiers qui deviendra un centre culturel important.

Les contraintes matérielles fixées par les TP qui délivrent les permis de restaurer sont très sévères. J’ai eu la chance de pouvoir pénétrer dans la cour de l’Hôtel des Templiers sans être vu et d’entendre une conversation engagée entre le conservateur ou l’architecte responsable des travaux et un entrepreneur : «Cette façade (en colombages et petites briques roses apparentes qui venait d’être refaite) devrait garder une certaine teinte verdâtre, bleutée, très discrète, de façon à ce qu’elle corresponde aux données du passé.» J’ai été étonné de voir combien chaque élément était pris en considération et combien cette restauration lui était chère, ainsi que tout le respect que les ouvriers témoignaient envers cette ruine qu’ils tenaient à ressusciter au plus près de sa réalité historique médiévale.

Je suis allé voir le curé de l’Abbatiale pour lui demander d’apposer le sceau de la paroisse sur ma carte de pèlerin. Il me reçut très gentiment – ce n’est pas toujours le cas – et me souhaita bonne route. Puis je suis monté à Notre-Dame-du-Puy qui m’attira davantage.

J’aurais voulu trouver d’intéressantes informations sur toutes ces richesses mais ni au Syndicat d’Initiative ni dans les librairies, ni à l’Office du Tourisme, je n’ai trouvé ce que je cherchais : l’histoire de Figeac, de son architecture, de ses habitants…

J’ai quand même réussi à dénicher deux coquilles Saint-Jacques sculptées dont l’une, très belle, sur un bénitier, et l’autre sur un chapiteau, dans l’église du haut.

Je suis toujours à l’affût de chapiteaux, sculptures, décorations rappelant la symbolique celte, ce qui me donne l’allure d’un professeur Tournesol à la recherche d’un trésor disparu. Je sais maintenant regarder au-delà de ce que se contentent d’admirer la plupart des touristes qui ont rarement l’idée de regarder le haut ou le bas des colonnes. Dommage qu’on ne puisse s’installer au niveau des représentations pour détailler ces animaux étranges, ces visages d’homme et de femme si expressifs, et peut-être aussi quelque signature cachée de compagnon facétieux.

J’aurais aimé avoir un guide-professeur à mes côtés pour m’expliquer tout ce que je ne comprenais pas et pour répondre à toutes les questions qui trottaient dans ma tête. Je ne dispose pas de crédits suffisants hélas, pour m’acheter, chaque fois que j’en ai envie, le beau livre d’images reproduites que me propose le libraire de faction, à la sortie des visiteurs.

Figeac m’a beaucoup plu, et mes deux incursions d’hier et de ce matin dans la vieille ville m’ont considérablement enrichi. J’étais d’ailleurs pratiquement seul à me promener en dehors des rues à magasins fréquentées par les touristes.

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